Le degré euro de la politique
--> 21 avril permanent
Un éditorial en première page du Monde du 10/01/2004, signé J-M C, met en garde contre les dangers de "l'habile démagogie d'un seul".
«Mais au-delà de cette habileté tacticienne, se met en place un mécanisme redoutable, et dangereux. Tout se passe comme si, en effet, Jacques Chirac pensait avoir trouvé la martingale électorale qui permet, en étouffant la gauche, d'organiser un durable face-à-face entre droite et extrême droite, et d'installer ainsi la droite au pouvoir pour longtemps. Ce schéma, celui du 21 avril 2002, a été le résultat d'une intense, excessive et démagogique campagne sur l'insécurité, celle du candidat Chirac lui-même.
Le thème de l'identité lui succède désormais, qui débouche sur le projet de loi contre le voile. Outre qu'une jurisprudence existe, il s'agit là, pour la société française, d'une véritable boîte de Pandore. Jacques Chirac y a certainement trouvé un nouveau ressort politique, en créant autour de lui un consensus paresseux, car il néglige la portée d'une telle démarche ; et, à ce stade, il fait oublier qu'une part essentielle du mal français tient aujourd'hui à l'absence d'une grande et forte politique d'intégration. En tout cas, chacun voit bien ce que l'extrême droite a pu gagner de l'exploitation du thème de l'insécurité. Elle va de nouveau gagner en légitimité grâce au fait que la question identitaire a été mise au cœur du débat national par la droite et la gauche. C'est un calcul politique porteur d'une grave responsabilité historique.
Comme est grave l'éloignement progressif d'une autre perspective d'intégration, tout aussi nécessaire, qui devait nous lier à l'Europe. Jacques Chirac nous éloigne aussi bien de l'Europe de Jean Monnet, celle de l'union politique, que de celle de Charles de Gaulle, une Europe indépendante. Le jeu français a consisté en effet à affaiblir la Commission de Bruxelles, au moment où il aurait fallu faciliter la gouvernance européenne, et à isoler la France et l'Allemagne, dans un jeu trop sommairement anti-américain parce qu'insuffisamment européen.
Ce 21 avril permanent est un piège redoutable pour la gauche qui, de l'Irak à la laïcité, semble condamnée à réitérer son vote du second tour de 2002. Mais il est surtout dommageable pour le pays tout entier qui, entraîné par l'habile démagogie d'un seul, fait l'impasse sur ce qui devrait être son ambition collective : refonder le pacte social et réinventer le creuset républicain en ne laissant personne, aucune minorité, sociale ou religieuse, sur le bord de la route.»
Statistiques, sondage et marché des changes
C'est pourtant bien inutile, si l'on en croit Pierre-Antoine Delhommais, qui analyse plus loin la "première crise de l'euro" et ses conséquences "politiques"
«Même si la reprise ne s'est pas traduite dans les statistiques du chômage, le simple fait de s'éloigner du contexte récessif dans lequel la France avait vécu une grande partie de l'année 2003 a constitué un soulagement. A contrario, une poursuite de la flambée de l'euro, en rebouchant l'horizon économique, replacerait M. Raffarin dans une situation très inconfortable. Sa courbe de popularité, dans les sondages d'opinion, est étroitement liée à celle de l'euro face au dollar sur le marché des changes.»
Alors, à quoi bon faire de la politique !
«Mais au-delà de cette habileté tacticienne, se met en place un mécanisme redoutable, et dangereux. Tout se passe comme si, en effet, Jacques Chirac pensait avoir trouvé la martingale électorale qui permet, en étouffant la gauche, d'organiser un durable face-à-face entre droite et extrême droite, et d'installer ainsi la droite au pouvoir pour longtemps. Ce schéma, celui du 21 avril 2002, a été le résultat d'une intense, excessive et démagogique campagne sur l'insécurité, celle du candidat Chirac lui-même.
Le thème de l'identité lui succède désormais, qui débouche sur le projet de loi contre le voile. Outre qu'une jurisprudence existe, il s'agit là, pour la société française, d'une véritable boîte de Pandore. Jacques Chirac y a certainement trouvé un nouveau ressort politique, en créant autour de lui un consensus paresseux, car il néglige la portée d'une telle démarche ; et, à ce stade, il fait oublier qu'une part essentielle du mal français tient aujourd'hui à l'absence d'une grande et forte politique d'intégration. En tout cas, chacun voit bien ce que l'extrême droite a pu gagner de l'exploitation du thème de l'insécurité. Elle va de nouveau gagner en légitimité grâce au fait que la question identitaire a été mise au cœur du débat national par la droite et la gauche. C'est un calcul politique porteur d'une grave responsabilité historique.
Comme est grave l'éloignement progressif d'une autre perspective d'intégration, tout aussi nécessaire, qui devait nous lier à l'Europe. Jacques Chirac nous éloigne aussi bien de l'Europe de Jean Monnet, celle de l'union politique, que de celle de Charles de Gaulle, une Europe indépendante. Le jeu français a consisté en effet à affaiblir la Commission de Bruxelles, au moment où il aurait fallu faciliter la gouvernance européenne, et à isoler la France et l'Allemagne, dans un jeu trop sommairement anti-américain parce qu'insuffisamment européen.
Ce 21 avril permanent est un piège redoutable pour la gauche qui, de l'Irak à la laïcité, semble condamnée à réitérer son vote du second tour de 2002. Mais il est surtout dommageable pour le pays tout entier qui, entraîné par l'habile démagogie d'un seul, fait l'impasse sur ce qui devrait être son ambition collective : refonder le pacte social et réinventer le creuset républicain en ne laissant personne, aucune minorité, sociale ou religieuse, sur le bord de la route.»
Statistiques, sondage et marché des changes
C'est pourtant bien inutile, si l'on en croit Pierre-Antoine Delhommais, qui analyse plus loin la "première crise de l'euro" et ses conséquences "politiques"
«Même si la reprise ne s'est pas traduite dans les statistiques du chômage, le simple fait de s'éloigner du contexte récessif dans lequel la France avait vécu une grande partie de l'année 2003 a constitué un soulagement. A contrario, une poursuite de la flambée de l'euro, en rebouchant l'horizon économique, replacerait M. Raffarin dans une situation très inconfortable. Sa courbe de popularité, dans les sondages d'opinion, est étroitement liée à celle de l'euro face au dollar sur le marché des changes.»
Alors, à quoi bon faire de la politique !