"Je suis un grand supporter de l'OMC, même si ses règles sont injustes"
--> Rencontre
Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie 2001 et ancien conseiller de Bill Clinton à la Maison Blanche, explique pourquoi la défaite de l'OMC à Cancun est une victoire pour la démocratie.
«Les dirigeants des pays en développement ne pouvaient signer les accords de Cancun sans risquer de se faire accuser à leur tour de s'être vendus aux Etats-Unis.»
Que pensez-vous de l'échec du sommet de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancun il y a un mois ?
« La défaite de l'OMC à Cancun est une victoire pour la démocratie. Dans le passé, les Etats-Unis et l'Europe à un moindre niveau se rendaient à ces réunions internationales et disaient en privé aux pays en développement : «Nous sommes d'accord avec vous : nous sommes hypocrites, les traités sont injustes. Nous devrions faire quelque chose pour l'agriculture, mais nos mains sont liées à cause de la démocratie : nos opinions publiques n'accepteraient jamais ce que vous nous demandez. Mais commencez par faire des concessions sur ça ou ça.» A Cancun, les pays du Sud ont tout simplement répondu que leurs mains étaient liées aussi, que leurs peuples savaient maintenant ce qui s'était passé durant l'Uruguay Round [traité signé en 1994 qui a lancé l'OMC, ndlr]. Ils ont dit : «On doit, nous aussi, rendre des comptes à nos opinions publiques. Impossible de revenir encore une fois avec un traité commercial injuste. Vos démocraties doivent comprendre que les négociations commerciales doivent être fondées sur la justice.»
Propos recuillis par Florent LATRIVE et Christian LOSSON. Le rste de l'entretien est dans Libération du samedi 25 octobre 2003.
L'Américain Joseph Stiglitz, 60 ans, est un grand spécialiste des défauts inhérents à l'économie de marché. Prix Nobel d'économie 2001, il a conseillé l'ex-président Bill Clinton à la Maison Blanche entre 1993 et 1997, avant d'être chef économiste à la Banque mondiale entre 1997 et 2000. Il a publié la Grande Désillusion, une charge musclée contre «la mondialisation qui ne marche pas». Dernier ouvrage paru : Quand le capitalisme perd la tête, chez Fayard.
«Les dirigeants des pays en développement ne pouvaient signer les accords de Cancun sans risquer de se faire accuser à leur tour de s'être vendus aux Etats-Unis.»
Que pensez-vous de l'échec du sommet de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancun il y a un mois ?
« La défaite de l'OMC à Cancun est une victoire pour la démocratie. Dans le passé, les Etats-Unis et l'Europe à un moindre niveau se rendaient à ces réunions internationales et disaient en privé aux pays en développement : «Nous sommes d'accord avec vous : nous sommes hypocrites, les traités sont injustes. Nous devrions faire quelque chose pour l'agriculture, mais nos mains sont liées à cause de la démocratie : nos opinions publiques n'accepteraient jamais ce que vous nous demandez. Mais commencez par faire des concessions sur ça ou ça.» A Cancun, les pays du Sud ont tout simplement répondu que leurs mains étaient liées aussi, que leurs peuples savaient maintenant ce qui s'était passé durant l'Uruguay Round [traité signé en 1994 qui a lancé l'OMC, ndlr]. Ils ont dit : «On doit, nous aussi, rendre des comptes à nos opinions publiques. Impossible de revenir encore une fois avec un traité commercial injuste. Vos démocraties doivent comprendre que les négociations commerciales doivent être fondées sur la justice.»
Propos recuillis par Florent LATRIVE et Christian LOSSON. Le rste de l'entretien est dans Libération du samedi 25 octobre 2003.
L'Américain Joseph Stiglitz, 60 ans, est un grand spécialiste des défauts inhérents à l'économie de marché. Prix Nobel d'économie 2001, il a conseillé l'ex-président Bill Clinton à la Maison Blanche entre 1993 et 1997, avant d'être chef économiste à la Banque mondiale entre 1997 et 2000. Il a publié la Grande Désillusion, une charge musclée contre «la mondialisation qui ne marche pas». Dernier ouvrage paru : Quand le capitalisme perd la tête, chez Fayard.